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Jeux olympiques et unité nationale : la grande illusion


lundi 12 août 2024









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Faisons un bilan rapide de l’expérience des JO de Paris 2024. Le plus frappant et le plus réjouissant est le remarquable succès sportif des équipes françaises. On peut mentionner aussi l’indéniable réussite technique de l’organisation et du spectacle. Le souvenir en restera. Mais quelle en sera la portée réelle pour le pays ?

On dit dans bien des commentaires, surtout de gauche mais aussi parfois du centre et de la droite ‘consensuels’, que cela a montré la possibilité d’une forme renouvelée d’unité nationale - et même d’un projet commun, voire pour certains ‘d’espérance’ et de ‘communion’, au-delà de la crise politique du pays, toujours présente. Certes, les gens ont bien souvent vibré ensemble, et en soi c’est bon ; ils ont vécu ensemble quelque chose de globalement réussi.

Mais de là à parler d’unité ou de projet commun, il y a un grand pas. Quant à relier cela avec l’idéologie qui a trop souvent imprégné les cérémonies d’ouverture et de clôture, là on tombe dans l’affabulation.

Sans jouer les rabat-joie, rappelons les limites de l’exercice.

Un exploit sportif même remarquable n’est pas un projet collectif

En premier lieu, l’image donnée par un sportif ou une équipe rattaché à son origine nationale n’est pas en soi porteuse d’un projet collectif, ni ne se rattache à une spécificité nationale. Je peux très légitimement être fier d’un sportif français, mais au fond son exploit ne dit rien de moi ni de ma vie ; l’identification reste donc passive et émotionnelle, au niveau de l’image et du drapeau. Et comme telle elle ne fédère pas un projet, même si elle peut contribuer à le mettre en scène. Comparons-la par exemple avec un résultat économique, ou dans un autre genre avec une action militaire : dans ces cas, on peut avoir un vrai enjeu collectif, qui peut potentiellement affecter, en bien ou en mal, le devenir de chacun. Pas avec le sport, quels que soient ses mérites.

L’idéologie sous-tendant les spectacles n’a rien à voir ni avec le sport ni avec ce qu’évoque la France

En second lieu, un évènement sportif est autre chose qu’un projet politique et a fortiori qu’une idéologie. Certes, dans le passé voire récemment, des régimes autoritaires ont pu vouloir mobiliser le sport (jeux de 1936 à Berlin, etc.), en jouant avec un certain effet sur des affinités entre leurs thèmes et le sport, ainsi sur l’effort et sur la compétition, vus comme un combat. Même si en soi, bien sûr, le sport est tout autre chose, comportant notamment le respect de l’autre. En revanche, la tentative de récupération du sport est particulièrement absurde dans le cas de l’hédonisme relativiste et mou, mêlé de provocations, qui imprégnait une partie appréciable des spectacles d’ouverture et de clôture.

De façon analogue, le spectacle d’ouverture et surtout plus généralement les jeux ont massivement utilisé Paris comme décor, non sans succès en termes de mise en scène. Mais aucun lien véritable n’était établi avec l’histoire nationale, encore moins ne suggérait en quoi ces monuments se reliaient à un quelconque patrimoine ou pouvaient être compris comme insérés dans un projet commun de type patriotique. Bien sûr, être propriétaire d’un monument et l’utiliser comme cadre pour des fêtes est tout à fait légitime, mais cela ne fait pas un projet, ni même un message.

La juxtaposition de styles contradictoires n’est pas un projet commun

On a assez insisté par ailleurs sur les aspects choquants du spectacle d’ouverture. Contrairement aux discours convenus des organisateurs, la recherche du scandale y affleurait régulièrement, et elle est aux antipodes de toute recherche d’unité. Ainsi avec la tête décapitée de Marie-Antoinette, ou l’évocation de la Cène au début de la scène correspondante - tellement manifeste par rapport à ce tableau si connu que nier tout lien est d’une rare malhonnêteté intellectuelle.

Mais au-delà de ces piques, le point central est que s’il y a un projet, le seul véhiculé par la cérémonie d’ouverture est le vivre ensemble, compris comme exaltation du relativisme (mêlé au thème du sport dans le spectacle de clôture). Le tableau emblématique est ici celui d’Aya Nakamura sortant de l’Institut et donc visuellement de l’Académie pour proférer ses chansons intellectuellement ineptes et faire se trémousser la garde républicaine. A nouveau, on a eu là une simple juxtaposition d’éléments contradictoires – rappelant le célèbre « beau comme la rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie ». On peut discuter de l’effet esthétique de ce genre de rapprochement ; même si en l’espèce, on ne le voit franchement pas. Mais en tout cas, ce n’est en rien la base ou l’image d’un projet – sans parler de culture ou de fierté collectives.

Il n’y a en effet dans tout cela aucune proposition positive, en dehors d’une idée de ‘tolérance’ qui n’est à nouveau qu’une juxtaposition. Et qui au fond met en scène une forme de décomposition individualiste.

Le seul message concret du détournement idéologique était finalement l’exaltation d’un mélange anarchique, qui est ruineux à terme

Enfin, si on cherche plus avant un contenu dans cette juxtaposition, et mis à part des thèmes bateau comme l’hymne à l’amour de Piaf, on rencontre deux éléments.

D’une part, le sexuel marginal : les drag-queens, l’excitation LGBT, les trouples etc. ; ce qui ne concerne qu’une faible minorité de gens et en choque beaucoup d’autres : ce n’est pas un programme collectif, ni la promesse d’une fécondité, encore moins un thème rassembleur.

Et d’autre part, à nouveau, ce relativisme qui est en définitive le seul thème politiquement effectif qui reste de tout ce message, traduit en l’espèce par une juxtaposition hétéroclite, une fois retombées les paillettes de la communication.

Ce n’est pas la diversité qui pose problème comme telle. Mais elle n’est vivable sur la durée que dans le cadre d’une vraie communauté, partageant des références communes propres, une vraie culture et une vraie mémoire collective, porteurs de fierté.

On peut en trouver un écho réel dans le sport, même si cela reste limité par nature : le respect mutuel y concerne des personnes qui, même venant d’horizons différents, pratiquent une même discipline dans tous les sens du terme, et donc ont à leur façon et sur ce point précis des objectifs, des valeurs, une culture et des règles de vie communes porteuses de sens. Mais au niveau de la vie réelle dans la société, une culture positive commune, c’est justement ce que le relativisme déconstruit.

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