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Vatican II et les tradis : réponse à certaines idées fausses


jeudi 14 juillet 2022









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Question : être attaché au rite tridentin, ou extraordinaire, signifie-t-il qu’on refuse Vatican II et qu’on se met par là en dehors de la communion de l’Eglise ?

Certains le pensent, notamment à la suite de déclarations du pape François. Le raisonnement est simple : Vatican II a débouché sur le rite actuel dit ordinaire ; qui ne l’accepte pas n’accepte pas le Concile, et se met en dehors. Point à la ligne.

Voire.

Le rite dit tridentin a été le rite ordinaire de l’Eglise romaine (plus exactement de la curie et de la papauté) sans grand changement depuis environ 15 siècles. Avant Pie V il coexistait dans la chrétienté latine avec de multiples rites apparentés ; la décision de ce pape a été de le codifier (sans créer un rite nouveau comme certains l’expliquent sans la moindre base), et d’éliminer tous les rites qui étaient alors anciens de moins de 200 ans. Par la suite, la Contreréforme a tendu à généraliser ce rite plus largement – même si les usages locaux ont subsisté dans bien des endroits.

Un tel rite pratiqué pendant une si longue période par l’Eglise, et au plus haut niveau, est par définition parfaitement conforme à la foi et apte à exprimer l’objet du rituel concerné, et notamment à offrir le saint sacrifice de la messe.

De son côté, le Concile Vatican II ne s’est nulle part donné pour but de transformer l’Eglise catholique, ni de lui faire franchir une étape radicalement nouvelle, ni de faire disparaître des maux graves qui l’auraient affectée. On peut toujours prétendre que c’eût été nécessaire ; mais on ne peut pas dire que c’est ce qu’a voulu faire le Concile.

S’agissant de la liturgie, la Constitution conciliaire, Sacrosanctum Concilium, demandait une révision des livres alors en vigueur, ceux de saint Pie V, rite qui a d’ailleurs été celui de tout le Concile jusqu’à la fin et sans objection. Il s’agissait de faciliter la participation des fidèles, de simplifier certains points, d’utiliser ici ou là la langue locale et d’enrichir les lectures proposées. Elle a été approuvée par une très forte majorité, y compris de nombreux évêques conservateurs dont Mgr Lefebvre. Il s’agissait donc bien d’une révision de la liturgie et non d’une réécriture. Et si on en était resté là, il n’y aurait pas eu de débat sur le sujet.

Au lieu de cela, et dans le cadre du gigantesque happening qui s’est emparé alors d’une partie de l’Eglise, invoquant un esprit du Concile qui n’a pas de base dans les textes de ce dernier, il a été procédé à une refondation radicale de la liturgie latine. Bouleversement du calendrier, élimination de fait du latin et du grégorien, retournement des autels et de l’orientation, réécriture de la majorité des oraisons, communion dans la main, flot massif de lectures nouvelles etc., les changements sont radicaux. Mais ils ne peuvent s’autoriser d’une demande expresse en ce sens du Concile. Ils sont légitimes, puisque le pape Paul VI les a promulgués, mais on ne peut prétendre que tels qu’ils sont, ils sont ce qu’a demandé le Concile. Ils en sont tout au plus une interprétation particulière, selon un processus de bouleversement sans précédent dans l’histoire liturgique de l’Eglise - comme Benoît XVI l’a rappelé.

Que dire alors de celui qui reste attaché à la liturgie antérieure ? Compte tenu de l’ampleur du bouleversement liturgique, l’esprit des deux rites est très différent. Et donc on peut parfaitement se reconnaitre dans ce rite antérieur et avoir des difficultés à trouver sa joie dans le nouveau, sans que cela implique un état d’esprit rebelle. Cela traduit chez la plupart une différence de sensibilité. Chez certains cela peut impliquer en outre une nette préférence pour le précédent rite, parce qu’il exprimerait mieux la conception catholique traditionnelle, toujours valable, sur le sens de la messe. Mais en quoi cela serait-il répréhensible ? En quoi cela s’opposerait-il aux textes conciliaires ? Bien sûr il y a aussi des gens qui refusent le concile ; mais parmi les adeptes du rite antérieur restés dans la communion de l’Eglise ils sont une très faible minorité.

Si on ajoute qu’il y a toujours eu multiplicité des rites dans l’Eglise, et même dans l’Eglise latine, tout cela conduit comme une évidence à admettre qu’à côté de ce pari qu’a été la rédaction d’une nouvelle liturgie, il y ait place pour ceux qui ressentent une nette préférence pour l’autre (ou sont porteurs d’une conviction en sa faveur). Les arguments visant à justifier une élimination de la liturgie antérieure et consistant à invoquer soit une règle liturgique posée par le Concile, soit un bouleversement de l’Eglise qui serait exigé par ce dernier, soit encore le besoin de l’unité, sont donc sans fondement.

En réalité toutefois, on sent pointer derrière de telles affirmations une autre idée : que le Concile est à voir non comme une étape dans la vie de l’Eglise, visant comme on l’a explicité à l’époque à parler au monde d’aujourd’hui et à dialoguer avec lui dans une langage plus adapté ; mais comme une rupture profonde, une réforme radicale d’usages et de conceptions non pas seulement désuètes, mais fausses, balayées par les progrès de la pensée ou de la foi et l’évolution du monde. C’est ce que Benoît XVI appelait, pour la rejeter, une herméneutique de la rupture. Rarement explicitée comme telle, du moins à un certain niveau, cette conception est sous-jacente au raisonnement de beaucoup de gens – et de théologiens ou de prélats. Dans cette optique évidemment, ce qui est nouveau remplace et annule ce qu’il y avait avant.

Mais les tenants de cette position ne comprennent pas que ce faisant ils ruinent toute la logique de l’Eglise catholique, dont ils se réclament pourtant. Car l’autorité que celle-ci reconnaît au magistère suppose à la fois la cohérence de ce magistère dans le temps, basée sur la permanence de la foi, et donc l’absence de rejet de ce qui a été validé à une époque, et l’acceptation d’une pluralité de charismes. Sinon on bascule dans la secte, où le poids de l’autorité est supposé absolu.


















































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